De la théorie…
L’écoute large est l’étape préliminaire à toute démarche d’animation d’une action collective à visée émancipatrice. C’est une phase cruciale puisque c’est à l’issue de celle-ci que se lance (ou non) le processus du développement du pouvoir d’agir. L’écoute large consiste à aller dans le quartier, discuter avec les habitants, afin de déceler une situation-problème. C’est une situation concrète, vécue ici et maintenant par plusieurs personnes, qui pèse sur leurs vies, à l’image d’une épine dans le pied ou d’un caillou dans la chaussure. Plusieurs personnes, touchées par cette situation, sont prêtes à se mobiliser pour trouver une réponse. Ce qui importe également, c’est qu’une victoire (même petite) est de l’ordre du possible. L’existence de chacune de ces caractéristiques devra être validée, sans quoi le risque est de voir l’action échouer.
… à la pratique
Dans le cadre de l’action expérimentale menée à Saint-Étienne (mais aussi à Rillieux-la-Pape), c’est une diversité d’acteurs intervenant sur un même quartier qui va s’appliquer à faire émerger et soutenir des actions collectives à visée émancipatrice. Aussi l’écoute large mobilisera-t-elle des acteurs de différentes structures pour aller à la rencontre des habitants en investissant une multitude d’espaces. Il s’agira pour ces professionnels -ou bénévoles- de recueillir les paroles et de croiser les dires avec leurs collègues et partenaires, de façon à identifier une situation-problème et repérer les habitants prêts à agir.
Au préalable, la production collective d’une carte mentale du quartier est un outil utile pour jeter les bases d’une stratégie d’écoute large. Une telle carte a notamment l’intérêt de pointer les endroits jusqu’ici peu investis et qui sont, pourtant, des lieux de passage ou des lieux où les habitants se retrouvent pour discuter. Autrement, ce sont des endroits idéaux pour aller « laisser traîner ses oreilles »…
Écouter, se livrer et garder de la distance
Concernant la posture à adopter lors de cette phase d’écoute large, un conseil est à retenir: il faut accepter de livrer un peu de soi, en réciprocité aux personnes avec lesquelles on s’entretient. Les relations humaines sont ainsi faites. Qui accepterait de se confier, volontairement, sur des aspects de sa vie, à une personne qui ne fait que poser des questions et qui ne dit rien d’elle-même ? Toutefois, il conviendra de rester vigilant à ne pas s’ouvrir trop et à ne pas porter de jugement sur la situation décrite, ni de prendre parti. Une distance doit être nécessairement maintenue, de manière à être en capacité par la suite d’accompagner un collectif, potentiellement sur ladite situation.
À Saint-Étienne, les participants à la formation-action sont allés dans l’espace public pour initier la mise en application du concept de l’écoute large. Retrouvez leurs témoignages sur cette expérience sur ce site.